Substitution des plastiques et réemploi en restauration collective : un guide pratique pour réussir sa transition

La fin des contenants plastiques en restauration collective n’est plus une option mais une obligation légale.
Pour accompagner cette transition, le groupe de travail « Plastiques » du Conseil national de la restauration collective (CNRC) a publié en Juin 2025 un guide complet de 84 pages intitulé Substitution des plastiques et réemploi en restauration collective.
Mise à jour d’un document initialement publié en Octobre 2024, cette version clarifie les interrogations soulevées par des professionnels du secteur. Le guide propose ainsi un ensemble de mesures qui s’inscrivent dans la stratégie nationale 3R visant la fin de la mise sur le marché d’emballages plastique à usage unique d’ici 2040.
Décryptage des enjeux et solutions pratiques.
Rôle et objectifs du GT plastiques
La mission du Groupe de Travail “Plastiques” du CNRC est de soutenir les gestionnaires et établissements de restauration collective français dans l’identification de solutions permettant de se mettre en conformité avec les évolutions réglementaires.
Cette réflexion naît d’un constat simple : le plastique est omniprésent dans la restauration collective (barquettes, couverts, films étirables etc.). Pourtant, ses effets délétères sur l’environnement et la santé sont aujourd’hui bien documentés : pollution des écosystèmes, migration de substances chimiques dans les aliments, perturbateurs endocriniens, microplastiques etc.
Présentation du guide
Le guide “Substitution des plastiques et réemploi en restauration collective” s’inscrit dans la stratégie nationale dite « 3R » (Réduction, Réemploi, Recyclage). Il vise à aider les professionnels à comprendre les obligations réglementaires, choisir les bons matériaux alternatifs et organiser la logistique du réemploi.
Le document se divise ainsi en trois grandes parties :
- Aide à la compréhension de la réglementation ;
- Aide au choix des solutions de contenants, lavage, suivi des contenants, couvercle et ergonomie ;
- Dispositifs de financement existants.
Êtes-vous concernés par la réglementation ?
Trois textes de loi principaux redéfinissent les règles d’usage du plastique en restauration.
- La loi EGAlim interdit depuis le 1er janvier 2025 l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en matière plastique dans les établissements scolaires, universitaires et d’accueil des enfants de moins de 6 ans. Cette interdiction s’appliquera au 1er janvier 2028 pour les collectivités territoriales de moins de 2000 habitants.
- La loi AGEC impose depuis le 1er janvier 2022 l’utilisation de vaisselle, couverts et récipients réemployables pour les services de portage de repas à domicile sous abonnement (minimum 4 livraisons par semaine).
- La loi Climat et résilience généralise les clauses environnementales dans les marchés publics, favorisant ainsi les solutions durables.
Cette réglementation concerne tous les contenants en plastique, qu’ils soient à usage unique ou réemployables, y compris la vaisselle et les couverts. Cependant, elle ne s’applique pas au conditionnement et transport des denrées ; en la matière, et lorsque les contenants sont en plastique, le guide recommande fortement d’effectuer ces opérations quand les denrées sont froides, et en utilisant des contenants adaptées à la nature des denrées (corps gras, acidité etc.).
Une tolérance existe pour les films étirables, opercules et joints en silicone utilisés pour la fermeture des contenants, à condition qu’ils respectent la réglementation sur les matériaux au contact des denrées alimentaires (MCDA).
Les alternatives : quel matériau choisir ?
Le guide présente un comparatif détaillé des matériaux conformes à la réglementation, évalués selon plusieurs critères, dont le coût, la recyclabilité, ou encore l’aptitude au contact alimentaire, à la cuisson ou au lavage.
- L’inox obtient les meilleures notes globales avec – notamment – une excellente durabilité et une parfaite aptitude à la cuisson et réchauffe. Le seul domaine dans lequel l’inox est moins bien positionné est la transparence. Par ailleurs, on notera quelques points de vigilance, tels que la qualité des joints utilisés pour les couvercles.
- Le verre se décline en trois types : le verre sodo-calcique recuit (résistance thermique limitée à 80°C), le verre trempé sodo-calcique (résistant jusqu’à 130°C) et le verre trempé borosilicate (passage au four possible). Principal avantage : la transparence et la recyclabilité totale. Inconvénients : aptitudes à la cuisson et à la réchauffe parfois limitées, poids, risque de bris et impossibilité actuelle du suivi par QR code.
- La porcelaine et la céramique offrent une excellente résistance à la cuisson et réchauffe, mais présentent des défis en termes de poids, fragilité aux chocs et absence de recyclabilité pour ces flux spécifiques.
⛔ Les matériaux non conformes incluent : tous les plastiques, même réemployables, les contenants en fibres végétales avec couche plastique, et les matériaux à allégations trompeuses comme « bambou naturel » ou « éco-friendly » sans preuve réglementaire.
Le GT précise ainsi : “à ce stade et à notre connaissance, les matériaux en fibres végétales réemployables présents sur le marché sont à considérer comme du plastique du fait de la présence d’une couche plastique”.
L’enjeu crucial du lavage
Le passage au réemployable suppose la mise en place d’un système de lavage performant (température, séchage, désinfection), souvent mutualisé entre établissements.
La réussite de la transition peut se faire selon deux modes distincts :
- Le lavage internalisé présente notamment l’avantage de maîtriser la qualité sanitaire et de limiter le nombre de contenants nécessaires. Parmi les inconvénients, citons l’investissement important en surface, machines et personnel, ainsi qu’une professionnalisation des équipes sur les protocoles de lavage.
- Le lavage externalisé délègue la compétence technique mais génère un surcoût de fonctionnement et une perte de maîtrise de la qualité. Deux options existent : avec ou sans location du matériel.
Le guide souligne un point crucial : il ne peut y avoir aucun compromis sur la qualité du lavage. Les contenants doivent être « parfaitement propres et secs » car tout défaut peut générer un risque sanitaire grave, notamment lors de la réchauffe des denrées, qui favorise le développement de micro-organismes.
L’ADEME met à disposition une cartographie des centres de lavages d’emballages sur le territoire national, que l’on peut filtrer par régions et type d’emballages pris en charge.
Marchés publics : intégrer les clauses environnementales
Pour les acheteurs publics, la reprise d’une alternative écologique au plastique présente dans ce guide dans le cahier des charges, constitue une clause environnementale valorisable. Cette approche s’inscrit dans les obligations de la loi Climat et résilience sur la commande publique durable.
Le document propose d’ailleurs un modèle de clause environnementale : « Le titulaire devra proposer des contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service ne comportant pas de matière plastique, conformément à l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement, tels que les contenants en inox, verre, céramique ou porcelaine.«
Une section est dédiée au cadre juridique de la commande publique durable (à partir de la page 29).
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Traçabilité : des solutions adaptées aux collectivités
Assurer le retour des contenants nécessite un système de suivi adapté. Le guide compare cinq technologies : étiquettes QR code, gravure laser, micro-gravure à percussion, étiquettes RFID et marquage jet d’encre.
La gravure laser et la RFID offrent la meilleure durabilité et performance de lecture, tandis que les étiquettes QR code et le marquage jet d’encre peuvent être plus économiques mais moins durables. La compatibilité sanitaire est généralement élevée pour toutes les technologies, mais les matériaux et la colle utilisés pour les étiquettes doivent être soigneusement choisis pour répondre aux normes.
Le choix dépend des priorités spécifiques : durabilité, performances de lecture, possibilité d’écriture de données et coûts. Trois modes de suivi sont possibles selon les objectifs : suivi simple du contenant pour assurer le retour, suivi du contenant et du contenu pour garantir une qualité optimale, ou optimisation complète des flux de la réception au retour des contenants.
Financement et accompagnement
Enfin, les acteurs de la restauration collective, responsables de la mise sur le marché de leurs emballages, doivent contribuer aux filières REP. Or, “les éco-organismes agréés de la filière REP emballages doivent utiliser 5% de leur budget pour le réemploi et doivent accompagner les acteurs de la filière vers des solutions plus durables”.
Il est dès lors conseillé de se renseigner sur les dispositifs de soutien tels que les appels à projet ou les appels à manifestations sur les sites des organismes concernés : CITEO et CITEO Pro.
Le guide décrit également des possibilités de financements, tels que des appuis à l’investissement par des banques pour des sociétés publiques privées ou à économie mixte, des prêts sur fonds d’épargne pour les EPL, ou encore des prêts à long terme pour les collectivités.
En pratique
L’accompagnement humain est essentiel : le guide insiste sur l’approche projet globale, bien au-delà du simple changement de contenants, impliquant conduite du changement, formation du personnel, révision de l’organisation spatiale et des procédures, et mise à jour du plan de maîtrise sanitaire.
Une page du document est d’ailleurs dédiée à l’ergonomie, et recense les impacts logistiques et fonctionnels à anticiper dans le cadre d’un remplacement des contenants. Les évolutions couvrent ainsi l’ensemble de la chaîne, de l’amont avec la production des repas, à l’aval avec la récupération des bacs propres.
La transition vers des contenants sans plastique représente un défi organisationnel et financier important, mais les solutions existent. Le guide du CNRC détaille l’ensemble des aspects techniques, réglementaires et pratiques pour réussir cette mutation obligatoire, qualifiant les modifications de systémiques.
Bien plus qu’une simple note réglementaire, ce guide est un véritable outil opérationnel pour les acteurs de la restauration collective : gestionnaires, acheteurs publics, fournisseurs, collectivités. Il décrypte les textes, analyse les risques, identifie les bonnes pratiques et oriente vers des solutions adaptées à chaque contexte.